Au palais de justice de Toulouse. (Illustration) — A. Gelebart / 20 Minutes

ASCENSEUR EMOTIONNEL

Toulouse : Il sauve un homme de la mort et est placé en rétention deux heures après

Béatrice Colin

Mercredi matin, avec un collègue, Mouktar a sauvé un homme victime d’un arrêt cardiaque. Le même jour, le jeune Tchadien de 24 ans a été placé deux jours en centre de rétention avant d’être libéré ce vendredi, soutenu par tous ses collègues

  • Mercredi matin, un jeune Tchadien a participé à sauver la vie d’un homme sur son lieu de travail, à Toulouse.
  • Deux heures plus tard, les forces de l’ordre l’emmenaient pour le placement en rétention, le jeune étudiant faisant l’objet d’une obligation de quitter le territoire.
  • Après la mobilisation de nombreuses personnes, notamment son employeur, le tribunal l’a remis en liberté.

Il a recouvré la liberté, après deux jours passés en centre de rétention. Mercredi matin, Mouktar, un jeune étudiant d’origine tchadienne, se rend tôt à l’entrepôt de l'entreprise pour laquelle il bosse en saisonnier depuis deux ans, Rentrée Discount. Il ne sait pas encore que cette journée va être aussi positive que négative pour lui.

« Vers 6h30, un transporteur s’est écroulé sur le parking, il est devenu tout bleu. La cheffe d’équipe, Mouktar et un autre collègue ont appelé les secours qui leur ont dit comment procéder à un massage cardiaque. Ils se sont relayés jusqu’à l’arrivée des secours. Ils lui ont sauvé la vie. Deux heures plus tard, la police est arrivée sur le dépôt et a emmené Mouktar », explique Marie Lys, la responsable du dépôt.

Elle pensait que les forces de l’ordre voulaient interroger l’employé à propos de leur intervention du matin. En réalité, ils ont pris la direction du centre de rétention. Le jeune homme est bien en possession d’une « attestation de demande de prolongation de son titre de séjour » qui lui permet de rester sur le territoire français en attendant un titre de séjour. Mais il est en réalité falsifié. Malgré son inscription à l’université, il fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire depuis le mois de février dernier.

Une pétition de soutiens

Il est arrivé sur le territoire en 2018, mais trois ans plus tard, les autorités ne lui ont pas reconduit son titre. « Comme son document arrivait à terme, il a eu peur de devoir partir, il a fait une bêtise. Mais il travaille, il est très apprécié de son employeur qui est prêt à le reprendre, 150 personnes ont signé une pétition pour le soutenir. Il n’est pas une menace pour l’ordre public », a indiqué ce vendredi Elfried Dupuy-Chabin, son avocate à la sortie de l’audience de demande de remise en liberté après son placement en rétention.

Elle a été entendue par les juges. « Un soulagement » pour ses soutiens. « Mouktar, c’est quelqu’un qui s’investit, toujours serviable, discret. On a été surpris d’apprendre que ses papiers n’étaient pas en règle, car à chaque fois que l’on embauche un étranger, nous envoyons les documents à la préfecture, qui, si elle ne répond pas dans les 48 heures, vaut pour validation. S’il a besoin d’une promesse de CDD pour l’aider, on la fera », affirme Marie Lys.

Pour l’instant Mouktar est à nouveau libre. Mais « il n’est pas sorti d’affaire », précise son avocate qui espère que la mobilisation portera. D’une part, parce que le parquet peut faire appel. D’autre part parce qu’il n’a toujours pas de titre de séjour. « Mais en tout cas, il n’a rien à faire en centre de rétention », plaide Elfried Dupuy-Chabin.

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