Lancée à l'été 2022, en Californie et en Suède, Mothers' Rebellion entend mobilier les mères et leurs alliées partout dans le monde pour qu'elles fassent entendre leurs voix dans la lutte contre le changement climatique. — Sebastien Salom-Gomis

Environnement

Climat : « On veut aussi faire entendre notre voix »… Les Mothers' Rebellion se mobilisent en France samedi

Fabrice Pouliquen

Parti de Suède, le mouvement Mothers’ Rebellion arrive en France. A Paris, Lille, Tours ou Lorient, des mères (et pas que) se rassembleront ce samedi, pour appeler nos dirigeants à des mesures à la hauteur des enjeux climatiques. Interview

  • Le mouvement est parti à l’été 2022 de Suède. Des mères ont pris l’habitude de s’asseoir pacifiquement en cercle dans l’espace publique pour exiger, elles aussi, que des mesures soient prises contre le changement climatique.
  • Ce mouvement des Mothers’ Rebellion for climate Justice a mis du temps à arriver en France. Mais c’est chose faite cette semaine. Les mamans se sont mobilisées à Toulouse et Auxerre samedi dernier. Et quatre autres actions sont prévues ce samedi à Lorient, Paris, Tours et Lille.
  • Arnica, qui a organisé l’action à Lorient et travaille depuis fin juillet à la création d’une branche française des Mothers' Rebellion, répond à 20 Minutes.

On ne présente plus Greta Thunberg et les grèves de l’école pour le climat que la jeune militante suédoise a initiées dès novembre 2018. Cinq ans plus tard, Fridays for future est devenu un mouvement international de la jeunesse, toujours actif. Leur dernière journée de mobilisation remonte au 15 septembre et a trouvé un écho dans 18 villes en France.

Surtout, Fridays for future a fait des petits. Notamment du côté des parents, avec le lancement, à l’été 2022, de Mothers’ Rebellion for climate justice - la Rébellion des Mères pour la justice climatique. Cette semaine encore, dans le cadre de la campagne d’action internationale pour demander la sortie des énergies fossiles, ces mères ont cherché à se faire entendre, de façon non violente, en s’asseyant en cercle, comme elles en ont l’habitude. Et pour la première fois, des Françaises sont de la partie. Quatre manifestations sont prévues ce samedi à Paris, Lille, Tours… Et Lorient, où Arnica, maman d’un petit garçon de 2 ans et membre du groupe local d’Extinction Rebellion (XR), cherche à lancer le mouvement. Elle répond à 20 Minutes.

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D’où est parti ce mouvement Mothers’ Rebellion for climate justice ?

Ce n’est pas simple à retracer. L’idée originelle viendrait de Californie, dans le courant de l’été 2022. Mais au même moment, en Suède, des mères avaient déjà commencé à manifester, assises en cercle. Le mouvement s’est répandu peu à peu dans une vingtaine de villes du pays avant de se faire connaître au-delà des frontières via les réseaux sociaux, mais via aussi les différents groupes d’Extinction Rebellion [autre mouvement social écologiste] avec qui Mothers’ Rebellion est très lié.

Dès la fin 2022, des premières sitting de mamans avaient ainsi lieu en Grande-Bretagne, en Allemagne et aux Etats-Unis. Puis très vite en Afrique du Sud et au Zimbabwe, où le mouvement a bien pris. Le 13 mai, pour la première grande journée d’actions conjointes des Mothers’ Rebellion, des cercles ont été formés dans une soixantaine de villes de 21 pays, sur les six continents. 1.500 mères y ont participé, dont la moitié en Suède.

Mais aucune en France à l’époque ?

Non. Nous travaillons à la création de la branche française de Mothers’Rebellion depuis fin juillet, et elle n’a vu le jour que cette semaine au final. Il y a sûrement plusieurs raisons à ce démarrage un peu tardif. En France, nous avons été beaucoup accaparés ces derniers mois par l’actualité sociale, en particulier la réforme des retraites contre laquelle, à XR, nous nous sommes beaucoup mobilisés. Il y a aussi en France une répression des manifestations climatiques qu’on ne trouve pas dans bien d’autres pays. En Grande-Bretagne et en Suède, les Mothers' Rebellion viennent avec leurs enfants. Elles les laissent jouer à l’intérieur des cercles. C’est impensable chez nous. On a tous en tête comment a dégénéré la manifestation contre les méga-bassines à Sainte-Soline (Deux-Sèvres) en mars dernier. Enfin, culturellement, ce rassemblement autour des mères pose parfois problème en France. Certains, parmi les militants climatiques, les jugent du coup trop peu inclusifs. Certaines militantes féministes le trouvent aussi trop réducteur. .

Est-ce le cas ? Faut-il être maman pour prendre place dans les cercles que forment Mothers’ Rebellion ?

Pas du tout. Les Mothers’ Rebellion emploient le mot « Mères » toujours avec un « m » majuscule. On renvoie à la dimension universelle du terme : celles qui prennent soin. Des enfants, des autres, de la Terre. On y englobe les mères, les filles, les sœurs, les tantes, les grands-mères et toutes leurs alliées. Et par alliés, ça peut très bien être des hommes. D’ailleurs, il y en aura avec nous à Lorient samedi. Ils sont les bienvenus, du moment qu’ils partagent notre inquiétude vis-à-vis des générations à venir.

C’est le dénominateur commun de ces mères en rébellion : cette crainte grandissante de l’avenir qu’elles laissent à leurs enfants. Et même, pour certaines, cette crainte d’en faire tout simplement. Face à ces questions, beaucoup de mamans se sentent isolées, hésitent à participer à des actions militantes risquées judiciairement ou qui peuvent dégénérer. Malgré tout, on a envie de faire entendre nos voix, de presser nous aussi nos leaders pour qu’ils prennent immédiatement des mesures à la hauteur des enjeux climatique et préparent une transition juste. On veut pouvoir regarder nos enfants dans les yeux plus tard et leur dire qu’on n’a pas détourné le regard face à la crise climatique, qu’on a essayé de faire notre possible pour bouger les choses.

Où seront les Mères en rébellion samedi en France ?

Samedi dernier, il y a déjà eu deux actions à Toulouse et Auxerre. Quatre nouvelles sont organisées ce samedi à Lorient, Lille [où elle s'appelle Parent's Rebellion], Paris et Tours. Chacun de ces groupes communique à sa manière. Nous avons décidé, à Lorient, de donner le plus d’informations possibles même si nous avons fait le choix de ne pas demander d’autorisation à la préfecture. L’action se déroulera à 16h00, place Aristide-Briand.

L’idée est toujours la même : une manifestation pacifiste, non violente, pendant une heure si nous ne sommes pas dispersés avant par les forces de l’ordre. Nous nous asseyons en cercle, tournées vers l’extérieur, en brandissant des pancartes sur lesquelles chacune écrira les messages qui lui tiennent à cœur. On en aura aussi un stock vierge de cartons sur lesquels les passants qui le souhaitent pourront écrire et nous rejoindre. L’importance n’est pas de convaincre à tout prix, mais au moins de faire réfléchir. Nous serons au minimum 25. Samedi dernier, à Toulouse, elles étaient 75. L’espoir est que cette branche française monte peu à peu en puissance. Une nouvelle journée d’actions se tiendra le 18 novembre, à dix jours de l’ouverture de la COP28 à Dubaï.

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